L’aube se lève sur Catane, le parfum d’une orange sanguine fuse dans l’air tandis que la silhouette sombre de l’Etna découpe le ciel, rappel que la Sicile mitonne ses histoires dans la lave et le sel. Entre vergers lumineux, marchés chamarrés et tables où le sucré tutoie le salé, l’île livre un abécédaire de saveurs capable de faire voyager un palais en une bouchée. Cap sur cette terre de contrastes pour percer le secret d’un Tarocco rubis, de la croûte craquante d’un cannolo et de l’éclat iodé d’un carpaccio Donna Mia.
Une île de lumière et de contrastes
Entre volcans, mer et soleil
Au nord-est, l’Etna étire ses coulées noires et fertiles. Sur ses pentes, les rangs d’agrumes côtoient les vignes, gonflées de minéral et d’iode transportés par les vents. Quelques centaines de mètres plus bas, les citronniers de la côte ionienne captent l’humidité nocturne, puisent la caresse du soleil diurne et livrent un jus vif, presque électrique. Cette double influence, volcan et mer, sculpte des fruits d’une intensité rare : la sanguine Tarocco, rubis à cœur, ou le verdello estival, croquant et herbacé.
La lumière, omniprésente, change les couleurs tout au long de la journée. À l’aube, les reflets rosés soulignent les villages perchés. À midi, le bleu cru de la mer tranche avec le gris basaltique. Au crépuscule, le ciel se couvre d’orangé, écho aux vergers qui s’étirent de Catane à Syracuse. Ce jeu d’ombres et de feu façonne une cuisine impatiente de fraîcheur, de zestes et de sel.

Une mosaïque de cultures et d’influences
Sicile rime avec carrefour. Grecs et Phéniciens ont laissé des temples, Arabes et Normands des dômes mêlant ogives et faïences, Espagnols des couvents devenus ateliers de confiserie. Les marchés racontent cette superposition d’époques : on y croise pistaches de Bronte, raisins secs, épices safranées, câpres de Pantelleria, autant d’ingrédients importés puis adoptés sans réserve. La gastronomie elle-même navigue entre épices d’Orient et technique latine, entre l’acidulé d’un agrume et la douceur d’une ricotta fraîche.
Cette diversité nourrit encore aujourd’hui l’assiette et l’imaginaire. Chez Donna Mia, chaque bouchée de Coupe Sicilienne ou de tiramisu joue cette partition : un clin d’œil arabe avec un zeste de citron, une once d’Espagne dans le cacao, une pointe de fraîcheur méditerranéenne qui rappelle le sel des embruns. Comme si l’île avait confié un fragment de son histoire, doux, lumineux, contrasté, à la table du restaurant.
Les saveurs sucrées et salées de Sicile
Les agrumes, les pistaches, les poissons
Impossible de parler de l’île sans évoquer le parfum d’une orange Tarocco ou l’acidité ensoleillée d’un citron de Syracuse. Leur pulpe sanguine ou blonde, chargée d’anthocyanes et de vitamine C, inspire aussi bien le sorbet que la salade d’hiver avec fenouil et olives noires. Dans les marchés de Catane, des verres de spremuta rouge rubis côtoient les filets d’espadon fraîchement levés. La même fraîcheur se glisse chez Donna Mia dans la Coupe Sicilienne, glace citron vert et limoncello, clin d’œil à ces vergers baignés de lumière.
Plus au nord, sur les pentes de l’Etna, la pistache de Bronte DOP se nourrit d’une lave millénaire. Sa robe vert émeraude, son goût intense de résine et d’amande douce parfument pesto, mortadelle maison ou simple granita pistacchio. Chez les pâtissiers, elle garnit un cannolo croquant, mélangée à la ricotta de brebis, et se marie volontiers avec un filet de miel de fleur d’oranger.
Côté mer, le détroit de Messine livre thon rouge, daurade royale et petits poulpes. Sel marin, zeste de citron Verdello et origan sauvage suffisent à sublimer un carpaccio. Le poisson se déguste aussi en couscous à Trapani, relevé d’amandes grillées et de pistache concassée. Terre et mer dialoguent ainsi dans chaque bouchée.
La rencontre entre Orient et Occident
L’île fut successivement grecque, arabe, normande puis espagnole. Chaque passage a laissé un ingrédient, un geste, un parfum. Du monde arabe viennent la canne à sucre, les agrumes, la cannelle, le clou de girofle ; de l’Occident, la technique des pâtes fraîches, les fromages et les vins doux. La cassata en est le parfait résumé : génoise normande, ricotta locale, écorces confites et pistache, le tout enveloppé de pâte d’amande introduite par les émirs.
Dans une caponata, les câpres de Pantelleria rencontrent les raisins secs et le vinaigre espagnol, créant un équilibre doux-amer typiquement sicilien. Le couscous di pesce, hérité de la côte maghrébine, se parfume de safran et de zeste de citron, tandis que la pasta con le sarde mêle fenouil sauvage, pignons et une touche de cannelle. Ce métissage permanent fait vibrer la table, entre épices orientales et simplicité méditerranéenne.

Une gastronomie de caractère
Les douceurs, les vins doux, les arômes intenses
Dans une île qui fleure l’oranger et le sel, le dessert n’est jamais un simple final. La cassata affiche ses strates de génoise imbibée, de ricotta douce et de fruits confits irisants. Le cannolo claque sous la dent avant de libérer la crème parfumée au zeste. Les pistaches de Bronte, d’un vert émeraude, se glissent dans les crèmes glacées ou se torréfient sur un semifreddo. Les amandes d’Avola signent le croquant d’un croccante au miel de zagara. Tout respire la générosité et l’intensité.
Les verres suivent le même sillage aromatique. Un Marsala semi-dry révèle des notes de figue et de tabac blond, parfait sur un cannolo encore tiède. Le Passito di Pantelleria, né de raisins Zibibbo séchés au soleil, rappelle l’abricot confit et la fleur d’oranger. Sur une mousse citronnée, la Malvasia delle Lipari déroule un parfum de maquis et de fruits exotiques. Ces vins doux gardent la fraîcheur de l’île grâce aux vents marins et aux nuits fraîches, offrant un équilibre qui évite toute lourdeur.
Une terre d’inspiration poétique
Le paysage comestible de la Sicile nourrit la littérature autant que les tablées. Quasimodo célébrait « le parfum blessé de l’orange », tandis que Lampedusa liait la couleur sanguine du Tarocco au déclin d’un monde. Sur les marchés, les dialectes roulent comme les barils d’agrume et chaque vendeur devient conteur. Une gorgée de Malvasia, un éclat de pistache, la mer en arrière-plan : tout invite à la métaphore.
Derrière cette émotion se cache un patrimoine métissé. L’apport arabe se lit dans le sucre de canne et les épices, la période espagnole dans le chocolat granuleux de Modica, la tradition grecque dans l’usage du miel. Ce brassage d’époques et de cultures a façonné une table qui parle d’amour, de lumière et d’exil, et qui continue de faire résonner ses vers dans chaque citronnière balayée par le sirocco.
La Sicile chez Donna Mia
Entre gourmandise et soleil
Chez Donna Mia l’assiette respire la lumière des vergers qui bordent l’Etna. Les zestes d’arancia rossa IGP parfument un carpaccio de daurade, le filet d’espadon se glisse dans une marinade citron verdi et menthe fraîche, la pistache de Bronte s’invite sur une burrata crémeuse. Chaque bouchée rappelle le marché de La Pescheria où les étals regorgent de fruits gorgés de sucre. Le chef joue sur le contraste sucré salé cher aux tables siciliennes : concassé d’amande grillée sur un ceviche de crevettes, réduction d’orange sanguine qui réveille un risotto safrané, huile d’olive Nocellara intense pour lier le tout.
Pour prolonger la balade sous le soleil, la carte propose un Negroni Tarocco twisté au jus frais de Tarocco et un verre d’Etna Bianco minéral qui souligne l’iode du poisson. L’atmosphère reste simple, conviviale, comme dans un agriturismo où l’on partage le pain chaud et l’huile parfumée en regardant les citronniers danser au vent.
Des desserts inspirés du Sud
La douceur prend ensuite le relais. La Coupe Sicilienne marie glace citron vert, limoncello maison et grains de pistache croquants, une parenthèse givrée qui évoque la granita savourée sur un quai de Syracuse. Le Tiramisu Original se pare d’un voile d’écorce d’orange confite et d’une eau de fleur de cédrat, rappel discret des influences arabes.
Les amateurs de traditions craquent pour le cannolo ricotta garni minute, zeste de citron Primofiore et copeaux de chocolat de Modica, ou pour la cassata al forno légère aux amandes et fruits confits. Une dernière gorgée de Marsala semi dry et le voyage se boucle sur des notes miellées, avec la promesse de revenir pour faire à nouveau rimer Sicile et douceur chez Donna Mia.
De l’Etna aux citronniers de Syracuse, la table sicilienne marie le feu, l’iode et un héritage pluriel que Donna Mia distille en bouchées lumineuses. Un cannolo tiède ou un Negroni Tarocco suffit à sentir battre cette île où le zeste parle, la pistache se souvient et le vin doux chuchote. Et si le prochain voyage se jouait simplement dans le craquant d’une pâte ou la fraîcheur d’un tarocco pressé, prêt à écrire sa propre histoire sur votre table ?

Petite leçon d’Italie
Fête : La Festa di Santa Rosalia, à Palerme.
Pendant plusieurs jours, Palerme vibre au rythme des tambours, des arancini frits et des granita au citron. C’est une explosion de couleurs, de musique et de parfums. Entre foi et gourmandise, la Sicile célèbre la vie sous toutes ses formes.